J’ai tellement de souvenirs d’enfance ici. Les couturières, les massicots, la poussière et les fils, partout…” Ici, c’était l’atelier de confection d’échantillons de la maison Pierre Frey. Ce lieu très symbolique, propriété de la famille depuis plus d’un demi-siècle, est devenu la maison de Vincent, l’un des petits-fils du fondateur. Avec son épouse Bianca, artiste et costumière d’origine cubaine, ils insufflent une belle énergie dans cet endroit où les histoires jouent à se surperposer. Sous sa verrière à 5,30 mètres de hauteur sous plafond, on trouve en effet un parquet Louis XV, des touches années 1930, dans un immeuble du XVIIe siècle où Bossuet a vécu, au coeur ce qui est aujourd’hui le “Little Tokyo” parisien. Un mélange d’époques, qui représente à merveille l’esprit du couple, avide de découvertes mais qui revendique son ancrage familial. “Nos inspirations sont liées à nos origines, souligne Vincent. Le textile est notre passion familiale, et nous aimons en avoir partout, du sol au plafond. Cela apporte une vraie chaleur.” Chaleur aussi avec les choix de couleurs et de motifs signés Bianca.
Une fois ses volumes repensés, cet espace sur deux étages se déploie avec fluidité. Peu de cloisons, peu de meubles, une grande ouverture sur le ciel : cette sobriété met en valeur la décoration peaufinée par Vincent et Bianca, qui ont pris le temps, “trois ans”, de la concevoir. Le temps aussi d’avoir deux garçons, Vasco, 3 ans, et Esteban, 18 mois. “Nous pourrions définir notre style comme ‘rétromodern’, même si ça ne résume pas tout, sourit Vincent. Notre designer préféré est Gio Ponti. Nous aimons les jeunes créateurs, mais une grande partie de ce que nous possédons vient de nos parents, comme les fauteuils en Plexi, les “Tulip” ou les chaises et tabourets René Herbst.” Pierre Frey, le respecté grand-père, nourrissait lui aussi une curiosité permanente pour les jeunes artistes de son époque. Il retrouverait sans doute cet esprit d’ouverture dans cet appartement plein d’élégance et de gaieté.
Par Sylvie Thébaud