Yorgos Zaphiriou, architecte, et Manolis Pandelidakis, scénographe, sont deux amoureux des Cyclades qui, depuis des années font doucement renaître l’île de Sérifos, longtemps oubliée. Au fil des ans, avec quelques autres pionniers tout aussi attentifs à la tradition, ils offrent une nouvelle vie aux bâtisses écroulées, aux éboulements de pierres sèches, aux murs ouverts au vent meltem. Pendant les premières années, ce sont les maisons du village, en haut de la colline, qui ont été privilégiées, suivies par les cabanes de pêcheur, au bord de la plage. Une troisième génération de “bâtisseurs” s’intéresse à présent aux terres intérieures et à des constructions radicalement différentes, bien loin du cube blanc qui fait rêver d’été. Yorgos et Manolis ont été précurseurs de tous ces mouvements. Leur découverte récente et dernier défi : un ancien abattoir, posé dans la campagne au milieu de nulle part.
Un maison ancienne réinventée
Dans ce paysage désertique de maquis roussi par le soleil, la pierre a repris tous ses droits, chargée d’un minerai qui lui donne des reflets d’or et de pourpre, et le sévère édifice ressemble à une forteresse cernée d’un muret, comme un enclos. Ouvertes sur deux cours intérieures, les pièces sont vastes, simples, fraîches, très peu meublées, rudimentaires mais confortables. Et, pour la première fois, Yorgos et Manolis ont pris des libertés avec les matériaux typiques des îles grecques.
Le sol en béton a remplacé les grandes dalles d’ardoise, les plafonds ont abandonné les calamis – roseaux alignés entre les poutres – pour de larges planches, les murs ont préféré à la chaux blanche le crépi grisé. Cette évolution ne trahit en rien l’esprit de l’île : le bâtiment reste un exceptionnel témoignage du passé. Et le travail des deux hommes, tout en discrétion et légèreté, montre l’une des façons les plus modernes de réinventer une maison ancienne, avec tout le respect dû à son histoire.
Dans une des deux cours intérieures dite “de jour”, on s’installe sous un auvent réalisé avec un rideau de camouflage de la même couleur que la pierre. La cuisine d’été est composée d’un comptoir maçonné coiffé de traverses de chemin de fer. L’évier est un ancien abreuvoir en pierre.