Alors que la 75 ème édition du Festival de Cannes déploie son traditionnel tapis rouge sur la Croisette, il est opportun de raconter la décoration du 7ème Art en se penchant sur les liens qui unissent les deux disciplines. Le cinéma a besoin du design pour planter son décor, et le design s’inspire parfois du cinéma pour raconter une histoire. Et quand les deux disciplines se conjuguent parfaitement, cela donne parfois des films ou des meubles d’anthologie. Quels sont les films qui ont influencé l’histoire du design, quels meubles et designers font référence au 7ème art ? On vous dit tout ! Moteur, action !

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Ces films cultes qui célèbrent le design

TURNER ENTERTAINMENT CO,. A TIME WARNER COMPANY.

« Un décor est un grand sentiment dramatique » disait le réalisateur Louis Jouvet. Et certains films ont si profondément marqué les spectateurs avec leur décor, qu’ils en sont devenus cultes. Tout le monde se souvient du fauteuil "Ball Chair" d’Eero Aarnio dans lequel se vautre le sociopathe Alex DeLarge dans l’Orange Mécanique de Stanley Kubrick. Mais l’œuvre du réalisateur qui contient sans doute le plus de références au design demeure 2001 Odyssée de l’espace. Le plateau de ce film réalisé en 1968 réunissait d’ailleurs pas moins de 35 décorateurs et de nombreuses pièces apparaissant à l’écran furent directement soumises par le co-scénariste Arthur C. Clarke, grand amateur de design. On peut ainsi y reconnaître la collection "Tulip" d’Eero Saarinen pour Knoll, l’Action Office de George Nelson édité par Hermann Miller ou encore certaines pièces de la collection "Djinn" d’Olivier Mourgue. Cette utilisation du design pour accoucher d’un univers futuriste et anxiogène a depuis été reprise dans des films plus récents tels que Bienvenue à Gattaca d’Andrew Niccol en 1997 ou encore 2046 de Wong Kar-Wai en 2004. 

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Le design, star des films de science-fiction

StudioCanal

 Par essence, le design sert donc souvent les films de science-fiction. Car la recherche de courbes, de formes, de couleurs ou de matériaux inédits correspond parfaitement au souci d’innovation visuelle des réalisateurs. Mais certains réalisateurs vont encore plus loin en concevant certains objets et éléments du décor de leur film, flirtant ainsi directement avec l’activité de designer. C’est par exemple le cas du français Michel Gondry dont le récent film L’Ecume des jours est truffé d’inventions insolites tirées ou non de l’œuvre de Boris Vian et ayant pour cadre l'incontournable Siège du Parti Communiste à Paris, oeuvre culte et futuriste signée par le maitre brésilien Oscar Niemeyer.

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La ville moderne, une obsession des cinéastes

Les Films de Mon Oncle

Tout comme le design, l’architecture occupe également une place de choix dans de nombreux films comme Le Cinquième Élément de Luc Besson, Brazil de Terry Gillian,The Shining de Stanley Kubrick (encore lui !) ou plus récemment Lost in Translation de Sofia Coppola ou encore Inception de Christopher Nolan qui dévoilent tous des décors de ville d'une absolue modernité. Mais pour retrouver le réalisateur le plus tatillon en matière de design et d’architecture, il faut remonter quelques décennies plus tôt, à l'aube des années 60, pour retrouver Jacques Tati et son incroyable capacité à faire du décor le personnage principal de l'un de ses plus grands films Playtime . Pour témoigner de la modernité extrême des villes des années 60 - qui vient détruire peu à peu l'esprit doux et heureux de ses précédents films - il créé de A à Z une ville fictive construite en studio, la Tativille, une ville éphémère et un budget mirobolant pour l'époque, qui aura de larges conséquences financières sur la vie du cinéaste.

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Ces films récompensés pour leurs incroyables décors

Studiocanal GmbH

Le décor d’un film est si important qu’il est souvent considéré par ses auteurs comme un personnage de l’intrigue à part entière. Il évoque un contexte, une époque, une culture particulière, et plonge le spectateur dans un univers qui fait intégralement partie de l’histoire. 

D’ailleurs les cérémonies des Césars en France et des Oscars aux Etats-Unis, prévoient chacune leur statuette pour récompenser les décors les plus réussis. Bien sûr, beaucoup des films primés dans cette catégorie sont historiques, mais pas seulement, la science fiction, ou le réalisme sont également souvent à l’honneur.

En France, on compte malgré tout une majorité de films historiques récompensés pour leurs décors à commencer par le tout premier d’entre eux, L’histoire d’Adèle H (dont l’action se déroule au milieu du XIXème siècle) de François Truffaut primé en 1976 lors de la première cérémonie des Césars. S’en suivront une multitude d’autres films dont l’intrigue s’inscrit dans une chronologie plus ou moins récente. De la Seconde Guerre Mondiale dans Le Dernier Métro (Césars 1981) au Paris du XVIIème siècle dans Cyrano de Bergerac (Césars 1991) en passant plus récemment par le Hollywood des années 30 avec The Artist.

Certains réalisateurs soignent tout particulièrement leur décor, et voient régulièrement leurs films récompensés dans ce domaine. C’est par exemple le cas de Jean-Pierre Jeunet qui s’entoure de décorateurs talentueux qui seront primés pour cette collaboration comme Jean Philippe Carp pour Délicatessen en 1992, Jean Rabasse pour La Cité des enfants perdus en 1996 ou encore Aline Bonneto pour Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain en 2002 et Un Long Dimanche de Fiançailles en 2005.

Pour les Oscars, les décors récompensés révèlent des univers bien plus hétéroclites. On retiendra pêle-mêle Autant en emporte le vent en 1940, Ben-Hur en 1960, West Side Story en 1962, Cabaret en 1973 ou encore La Guerre des Etoiles en 1978. Plus récemment l’Oscar du meilleur décor a récompensé Moulin Rouge en 2002 Avatar en 2010 ou Hugo Cabret en 2012. Et parmi les réalisateurs les plus distingués pour le décor de leur film figurent Tim Burton avec Batman en 1990, Sleepy Hollow en 2000, Sweeney Todd en 2008 et Alice au Pays des Merveilles en 2011 ou Steven Spielberg, pour Les Aventuriers de l’Arche Perdue en 1982, La Liste de Schindler en 1994 et Lincoln.

Vidéo du jour
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Ces designers qui célèbrent le cinéma

Romain Ricard

Si les bons films doivent pouvoir compter sur de bons décors, très peu des designers ont un jour décidé de passer derrière la caméra. Si l’architecte Robert Mallet-Stevens fut l’un des premiers décorateurs attitré du cinéma des années 20, rares sont ceux qui ont un jour côtoyé le 7ème art, à l’exception bien sûr de l’allemand Fritz Lang qui fut architecte avant de réaliser son inoubliable Metropolis en 1927.

La meilleure façon pour un designer de s’immiscer dans le cinéma est encore de concevoir une salle de projection. Il y a quelques années déjà, Philippe Starck a ainsi signé le Cinéma des Lumières et ses 99 places installées au cœur de l’hôtel Royal Monceau quand India Mahdavi conçoit toute la décoration du Germain Paradisio. La talentueuse Matali Crasset a proposé quant à elle une conception inédite des salles obscures en rénovant le Nouvel Odéon de sa griffe anticonformiste quand les créatrices de Tsé-Tsé ont couvert d’étoiles et de miroirs le cinéma Saint-Germain-des-Prés.

En 2021, la société MK2 ouvrait son premier cinéma-hôtel, le Paradiso,  à deux pas de la place de la Nation à Paris. Une toute première dont la décoration a été confiée à l’architecte d’intérieur, Alix Thomsen. Pour cette nouvelle expérience, la créatrice a misé sur une décoration discrète qui fait écho à l'atmosphère de la salle de cinéma, faite d'affiches de cinéma, de velours et de rideaux rouges. Son principal défi ayant été d'intégrer l’écran de projection à chaque chambre.

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Où acheter des meubles de cinéma ?

Popperfoto/Getty Images

Les collectionneurs sont parfois prêts à dépenser des sommes folles pour assouvir leur amour du 7ème art en acquérant certains objets issus du tournage de leur film préféré. D’autant qu’Hollywood n’hésite pas à mettre aux enchères certaines pièces de légende pour la céder au plus offrant. Parmi les plus chères de l’histoire, on compte la célèbre robe blanche portée par Marilyn Monroe dans Sept ans de réflexion ou encore l’Aston Martin conduite par Sean Connery dans le James Bond Goldfinger, tous deux adjugés à 4,6 millions de dollars. Moins chers, le costume de lion du Magicien d’Oz a trouvé preneur à 700 000$ et celui de Dark Vador à 250 000$.

En France, les amateurs de décors de cinéma pourront parfois trouver leur bonheur en fréquentant également certaines ventes aux enchères thématiques, comme la célèbre salle Drouot. On peut aussi y aller au culot en s’adressant directement aux studios de tournage (Studios de Paris, Cité du cinéma). Ou faire preuve de patience en surveillant les enchères spéciales de salles de cinéma cultes comme ce fut le cas pour La Pagode à Paris ou de célèbres loueurs de mobilier et d'accessoires pour le cinéma comme récemment Locatema qui s'est séparé de près de 60 000 objets.

Enfin, si vous souhaitiez un jour créer votre propre décor de film, il existe des sociétés spécialisées (Vachon) dans la location de mobilier thématique. Mais si vous estimez que c’est au contraire votre intérieur qui mériterait de passer à l’écran, vous pouvez aussi le mettre à disposition pour des tournages et côtoyer ainsi l’envers du décor tout en gagnant de l’argent !

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