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Introduction

Ça y est, je suis officiellement dépressive ! Les statistiques sont formelles : le déménagement est la troisième cause de dépression après le deuil et le divorce (qui pend au nez de mon mari, l’homme le moins bricolo de la terre). Ma tante Lucienne (93 ans le mois prochain, en pleine forme) a enfin réussi à expulser les locataires de l’appartement mitoyen du sien, dont elle est propriétaire, et m’a convaincue de venir y vivre. Magnanime, elle a consenti à un effort financier extrême sur le loyer (moins 5 %), et n’a eu de cesse de me vanter les mérites de son quartier (écoles formidables, verdure omniprésente, calme, commerçants nombreux et sympathiques). Je la soupçonne pourtant d’avoir l’intention de faire de moi son chauffeur-cuisinière-secrétaire…
Donc, du 18e arrondissement au 16e, ça y est, je fais le grand saut. Ma nouvelle destination est extrêmement mal vue par mes copains : "Comment, toi, tu vas chez les bourges ?" Mais vous serez peut-être surpris d’apprendre qu’actuellement, le 16e arrondissement est le quartier qui a le meilleur rapport qualité-prix de Paris. Pourtant, je regrette déjà ma décision : comment vais-je m’y prendre pour déménager tout ce que nous avons accumulé en dix ans et deux enfants ?

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Option 1: je déménage seule

Sophie Touzet

L’avantage majeur, c’est le faible coût de cette solution. Les désavantages sont malheureusement nombreux et variés. Il va falloir que je pense à tout...

Estimer le volume à déménager en allant surfer sur ledemenageur.com ou maison-facile.com. Ce qui n’est pas évident : au bout d’une heure d’effort, l’écran affiche triomphalement 67 m3. En réalité, mon appartement ne contient "que" 34 m3.

Louer un véhicule utilitaire. Grâce à vivremalin.com. Par exemple, Ada propose la location d’une camionnette 12 m3 à 75 € TTC pour la journée et fournit couvertures, cartons et chariot à la demande. L’alternative, c’est le “pack Confo déménagement”: moyennant 300 € d’achat chez Conforama et pour 1 € supplémentaire, je bénéficie d’une camionnette pendant 24 heures, en semaine, fournie avec un diable (conforama.fr).

Louer des couvertures de déménagement, un diable et, s’il le faut, un élévateur vertical. On trouve tout ça sur kiloutou.fr.

Trouver des gros bras musclés pour m’aider à tout transporter (en plus, ce sera peut-être agréable à regarder…). Je contacte une association de chômeurs comme Dynamo (01 48 07 28 82).

Acheter du matériel de déménageur. Les cartons, c’est cher ! Chez Castorama, le lot de 15 grands cartons est à 39 €. L’idéal, donc, c’est d’en récupérer dans l’entrepôt d’une grande surface, type hypermarché, moyennant quelques sourires et un peu de minauderie. Si cette technique échoue, on peut acheter un kit déménagement avec cartons, rouleaux adhésifs, papier bulle, toujours chez Casto. Mais moi, je préfère emballer mes affaires avec des couvertures sympas, et je customise mes cartons avec du scotch rigolo, de jolies étiquettes et des marqueurs fluo.

Penser à bloquer une place de stationnement devant mon nouvel immeuble.

Le problème, c’est que je n’ai plus vingt ans, moi, et déjà trois lumbagos à mon actif. Quant à mon mari, il est totalement inutilisable (d’autant que la date du déménagement coïncide pile avec les play-offs de la coupe de je-ne-sais-quoi…). Et mes copains sont peut-être à la vie à la mort, mais pas au déménagement. "Ma vieille, fallait pas épouser un riche, me tance mon copain Bertrand. T’aurais créché dans un studio, j’dis pas, mais avec tes 100 m2 au quatrième étage, faut pas pousser mémé dans les orties !" Classe.

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Option 2: je déménage avec des professionnels

Je fixe la date de mon déménagement. Saviez-vous que les devis varient presque du simple au double selon que vous déménagez en hiver ou en été ? Et qu’il vaut mieux éviter de déménager en début ou fin de mois, et en période de vacances scolaires ? Le pire, c’est la dernière semaine de juin, celle que j’ai évidemment choisie, comme tout le monde, à cause des écoles des enfants qui changent à la rentrée (l’idée de traverser Paris deux fois par jour ne me tente pas plus que ça), et des grandes vacances (on case les enfants chez les beaux-p’, on s’incruste chez des amis ou au pire, chez mes parents, et hop, deux mois de loyer en moins).

Je choisis mon entreprise de déménagement, ce qui n’est pas de la tarte. Deux mois avant la date prévue, je fais établir quatre devis à domicile par des entreprises certifiées NF Service (j’évite celles qui déclarent travailler “dans le respect des normes”) : deux trouvées sur Internet, grâce à la chambre syndicale du déménagement (csdemenagement.fr) et deux par relation. Et là, entre le monsieur qui m’explique “pas besoin de monte-meubles, moi j’utilise une corde” et celui qui me propose de “mettre six gars et deux camions” dès la veille, mon cœur balance, et le curseur prix aussi (du simple au triple !). J’opte pour le devis moyen (toute l’histoire de ma vie…).

Je choisis le type de prestation. En gros, il en existe trois : la première, c’est moi qui emballe et déballe tout (sauf le fragile) ; la seconde, ce sont les déménageurs qui emballent et moi qui déballe (sauf le fragile) ; la troisième, les déménageurs font tout. J’opte pour la seconde (il n’y a que 250 € d’écart en moyenne avec la première, et la troisième me semble chère et compliquée : s’il faut que j’explique toutes les trois minutes que moi je suis maniaco-dépressive et que les verres à eau, je ne les range pas avec les verres à vin, on n’est pas rendus).

Une fois l’entreprise sélectionnée, je retourne rapidement le contrat signé accompagné de mon chèque d’arrhes (20 % du devis) pour confirmer le déménagement et en figer la date. Je n’oublie pas d’indiquer aux déménageurs les conditions d’accès à mon nouvel appartement (ascenseur ou non, taille de la cage d’escalier, étage, particularités de la rue…), sinon cela peut me coûter cher financièrement et moralement. Lors de son déménagement, mon amie Rebecca avait oublié de mentionner que sa nouvelle cage d’escalier était minuscule : rien ne passait. Les déménageurs, furieux, ont fini par déverser dans la rue le contenu du camion. Elle a demandé à son copain d’aller lui chercher un fusil.

Au moins trois jours avant le déménagement, je remplis et retourne signée la déclaration de valeur (elle sert à fixer les montants d’indemnisation en cas de casse ou de perte par les déménageurs). J’y aurai listé les biens dont la valeur dépasse 300 € (comme l’affreuse lithographie que ma belle-mère a offerte à mon mari, avec, marqué : “Chéri je t’aime” en très gros). Pour m’aider, je me réfère à mon assurance multirisque habitation et j’en profite pour l’actualiser.

À la fin du déménagement, je signerai la lettre de voiture après avoir fait le tour des lieux en compagnie du chef d’équipe et à condition que tout se soit bien passé (dans mon cas, ils ont oublié de déménager la cave !).

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J- 2 mois

Sophie Touzet

Si je suis copropriétaire, je demande un arrêté de compte à mon syndic. Si je suis locataire, je préviens mon propriétaire de mon départ par lettre recommandée avec A/R et je fixe une date pour l’état des lieux de sortie (j’en profite pour régler mes comptes avec le terrifiant M. Bonnard, mon propriétaire, qui n’a jamais accepté que je repeigne ma cuisine en violet).
Je préviens mon employeur afin de fixer la date du congé auquel j’ai droit (j’aime la France).
Je me renseigne auprès de ma Caisse d’allocations familliales (CAF) sur la prime de déménagement à laquelle je peux prétendre si je vais ou viens d’avoir un troisième enfant (Dieu m’en garde).
J’interroge ma banque pour un prêt déménagement/crédit à la consommation et je prévois éventuellement une assurance pour mon déménagement.
J’ai l’infortune d’avoir un enfant en primaire et l’autre en secondaire, je dois donc prévenir leurs actuels établissements de leur départ et les inscrire dans de nouvelles écoles, donc je contacte ma nouvelle mairie pour la petite et l’accueil de l’inspection académique de mon futur logement pour le grand (aux cris de : “M’en fous, ça craint, j’irai pas !” et “Ze veux pas quitter Emilio, zaime Emilio, z’est mon fianzé !”).

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J- 1 mois

Je me rends sur le site changement-adresse.gouv.fr, qui permet d’un coup de prévenir les organismes suivants : Assurance maladie, CAF, ANPE, Assedic, impôts, retraites…
Je demande à La Poste une réexpédition définitive de mon courrier, soit dans un bureau de poste soit en ligne sur reexpedition. laposte.fr (coût : 18,29 €, pas un centime de plus!).
Je transfère mes comptes bancaires (dommage, j’aimais bien monsieur Brut, mon banquier).
Je transfère mes abonnements : électricité et gaz, téléphone, eau, magazines, télévision et Internet (le problème avec Noos, c’est : premièrement, qu’ils me demandent un justificatif du nouveau domicile, ce que je ne suis pas en mesure de fournir un mois avant, et : deuxièmement, que le dénommé Michel-Ange, après m’avoir fait une proposition en or pour mon nouvel abonnement, ne prend plus mes appels à 0,34 € la minute).
J’avertis mon employeur, mon assurance et ma mutuelle. Si je suis indépendante ou profession libérale, je préviens l’Urssaf.
Je fais actualiser mes papiers d’identité : carte grise, permis de conduire, carte d’identité, passeport, carte d’électeur, ce qui représente environ 12 allers-retours et 18 heures d’attente.

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J- 1 jour et Jour J

Sophie Touzet

J’ai pris la formule "les déménageurs emballent", mais je prends soin de faire moi-même un carton d’essentiels par pièce, pour le lendemain soir (ex : liquide vaisselle, pâtes, Nescafé et couverts pour la cuisine).
Je vidange le lave-linge, je bloque son tambour, je dégivre le frigo et le congélateur.
Je dépose, de force s’il le faut, mes enfants chez ma mère. Le chat aussi.

Le jour J
Je garde sur moi les papiers d’identité, les papiers en rapport avec le déménagement (justificatif de domicile, certificat d’assurance et lettre de voiture) et les bijoux (je suis une déménageuse-sapin de Noël).
J’offre une boîte de chocolats au patron du café d’en bas : à cause du camion, sa terrasse est vide !
Monsieur P., mon chef d’équipe, n’est peut-être pas le couteau le plus tranchant du tiroir, mais il est très sympathique : il chante en travaillant. Je finis la journée dépressive et sourde. Avec un mal de tête carabiné. Le problème, c’est que mon bandeau glacé anti-migraines, celui qui me donne un faux air de Björn Borg d’après mon fils, gît au fin fond d’un des cartons…

Le lendemain, jour de grand déballage
Je ne vous le cache pas, c’est ce qu’il y a de pire dans le déménagement… Un conseil : commencez par la cuisine. J’ai trois jours ouvrables pour constater d’éventuels sinistres et envoyer à mon déménageur un recommandé. Bon, disons, dans deux mois, le temps de tout nettoyer (grâce à toutclean.com, je sais combattre les mites alimentaires) et de tout ranger, j’organiserai une méga-pendaison de crémaillère, histoire de guérir de ma dépression. Au fait, j’ai décidé de ne pas divorcer. Il faut seulement que j’accepte le fait que mon mari ne saura jamais changer une ampoule. C’est comme les léopards : ils meurent avec leurs taches…

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