"C'était une boîte vide, étroite, toute en hauteur, un atelier dans une cour, sans autre lumière que celle de la verrière zénithale", explique l'architecte Isabelle Stanislas qui a initié le projet. Pour transformer ce local artisanal du Faubourg-Saint-Antoine en pied-à-terre pour une grande voyageuse, elle a imaginé une circulation à la verticale comme une maison d'écureuils et partagé le volume en deux, laissant d'un côté la hauteur totale de six mètres pour le séjour et creusant le sol de l'autre côté pour pouvoir y installer trois paliers desservis par un escalier en béton ciré. Ces niveaux, pour l'un légèrement en contrebas et pour les deux autres conçus comme des "loggias suspendues", s'ouvrent sur l'espace principal par des fenêtres intérieures, qui leur permettent de bénéficier de sa lumière.
Les trois murs du salon sont spectaculaires : l'un est tapissé de livres du sol à la verrière, le second s'efface entièrement derrière une œuvre de Françoise Doléac où "des pointillés d'inox miroitants évoquent un mouvement circumpolaire" et le troisième est recouvert d'une peinture minérale aux pigments de nacre, réalisée par Marine Caillé et Lionel Bourcelot, de l'agence Kerien Partners qui ont pris le relais de l'architecte d'origine.
Se considérant comme des artisans, ces architectes d'intérieur essayent de réaliser un travail écologique, notamment en fabriquant eux-mêmes les peintures selon des recettes anciennes sans polluants. "Nous pensons que c'est une nécessité de ne pas introduire de matériaux toxiques dans les maisons", soutiennent-ils. Si leurs convictions vertes ont guidé leurs choix de matériaux, le duo a travaillé plus classiquement pour les aménagements : plancher de chêne vieilli aux larges lattes, paroi de verre violet pour isoler la cuisine de l'entrée, bois sur la tranche intérieure des poteaux métalliques et marbre pour la crédence de la cuisine. Ils ont également créé ex-nihilo une belle salle de bains aux couleurs sable et blanc au premier niveau et un lit clos au second étage où alcôve, placards et rambarde sont capitonnés d'un cuir américain couleur crème. Grâce à un projet architectural rigoureux et à la beauté des matières et des détails faits main, cet espace difficile est devenu un lieu étonnant où il fait bon vivre.
Catherine Ardouin assistée d'Eléa Lou Le Gangneux